Créer collectivement un jardin-forêt en permaculture : épisode 4, l’épreuve du feu, c’est l’été.

Créer collectivement un jardin-forêt en permaculture : épisode 4, l’épreuve du feu, c’est l’été.
Après un printemps 2017 plein de promesses pour la forêt-jardin, l’été est arrivé à TERA et on l’a senti passer !

Coup de chaleur et sueurs froides

Si j’avais un seul conseil à donner à ceux qui souhaitent lancer une forêt comestible au sein d’un projet collectif, c’est de s’assurer que le relais humain des arrosages n’est jamais interrompu. Cela peut sembler évident, mais le propre d’un projet collectif est d’être tellement bouillonnant et prenant qu’on peut en oublier l’évidence. C’est exactement ce qui s’est passé chez nous au mois de juin. Une absence de quelques semaines de ma part, couplée à la canicule qui a sévi partout en France et à une coordination insuffisante à la ferme, a exposé le jardin-forêt à la pleine puissance du soleil brûlant sans la moindre goutte d’eau pendant un mois. À mon retour, le spectacle était tellement désolant que j’ai envisagé pendant quelques secondes d’abandonner le projet.
Suivi de la création d’un jardin-forêt comestible en permaculture au sein de la communauté du projet TERA.

Un noisetier et un cornouiller juste après la canicule + sécheresse. © Gregor Alécian

La motivation a rapidement repris le dessus cependant, ainsi que la capacité de réaction du collectif et la résilience de la nature. Dès les premiers arrosages en profondeur, les plantes qui avaient le moins souffert ont retrouvé leur pleine forme. D’autres, comme les Nashis, les cornouillers, les noisetiers, dont le feuillage avait totalement séché, ont laissé tomber toutes leurs feuilles pour en refaire de nouvelles. Certaines herbacées littéralement carbonisées comme les consoudes, sont reparties du pied pour une partie d’entre elles. Cet épisode nous a également permis de constater la pertinence des indications des fiches de guildes végétales de Permaculture Design quant à leur besoin en eau. La guilde du pêcher, donnée pour la moins demandeuse en humidité, a effectivement été la moins touchée et n’a connu aucune perte ni grande perturbation durant la sécheresse torride. Fait d’autant plus remarquable que toutes les plantations datent de cette année, que les systèmes racinaires sont en pleine phase d’adaptation et qu’ils n’avaient pas besoin d’un stress hydrique supplémentaire !
Suivi de la création d’un jardin-forêt comestible en permaculture au sein de la communauté du projet TERA.

… et les deux mêmes plants, quinze jours après la reprise des arrosages ! © Gregor Alécian

Au final, le mois de juin aura causé quelques pertes (un argousier, deux baguenaudiers, quelques cassissiers, quelques consoudes officinales…), et pas mal de stress pour les plantes de la forêt-jardin. Mais la résilience de l’ensemble est impressionnante alors même qu’on ne peut pas encore parler d’écosystème et que les synergies entre toutes les plantes des guildes vont mettre un peu de temps pour s’installer. Nous pouvons nous estimer heureux et profiter de cette expérience pour faire mieux la prochaine fois.

Récoltes symboliques et densification des herbacées

Cet été, nous avons eu le plaisir d’avoir nos toutes premières récoltes de la forêt comestible (en plus du vieux verger qui nous apporte pommes, figues, noisettes, prunes…). Même si elles sont symboliques pour le moment, elles donnent l’énergie pour aller plus loin. Après la première cerise de l’année sont venues les premières fraises à la toute fin du printemps. Les fraisiers remontants sont d’ailleurs en ce moment même (début septembre), en train de nous donner une nouvelle récolte. Les premières petites nectarines étaient très bonnes au mois d’août, ainsi que les premières mûres, LA première groseille, LA première pomme. Les aromatiques ont bien donné dès la première année, et les bulbilles des oignons vivaces étaient parfumées à souhait.
Suivi de la création d’un jardin-forêt comestible en permaculture au sein de la communauté du projet TERA.

Fraises, mûres, oignon rocambole avec ses bulbilles aériennes. © Gregor Alécian

En parlant de ça, nous avons repiqué nos premières bulbilles d’oignons rocambole, c’est un jeu d’enfant et ça reprend très bien. Nous avons réparti huit pieds entre différentes guildes l’hiver dernier. Il y en aura deux à trois fois plus l’an prochain, en sachant que nous avons consommé une partie de la récolte symbolique. C’est un bon exemple d’extension facile des cultures herbacées des guildes. Une de nos deux variétés de fraisiers s’est montrée particulièrement vivace et prompte à faire jaillir des stolons pour s’automarcotter et se multiplier. Sur l’une des parcelles de fraisiers que nous avions préparées, nous sommes passés de douze à plus de trente pieds, en moins de 6 mois. Techniquement, nous avions choisi de préparer une zone complète (toute la terre de surface) pour planter les fraisiers plutôt que de creuser des trous dans la prairie (ce que nous avons pourtant fait pour toutes les autres herbacées et rampantes). Ainsi, et grâce à un paillage uniforme, ils ont eu très peu de concurrence pour leurs stolons. Puis, à chaque fois qu’un stolon semblait vouloir faire un nouveau pied, j’ai écarté la paille autour pour mettre le nouveau pied en contact avec le sol et accélérer son enracinement.

L’entretien continue sur l’ensemble du jardin-forêt

La question de l’arrosage a bien évidemment été cruciale tout au long de l’été, indépendamment du malheureux épisode du mois de juin. Les arrosages ont été rapprochés à une fois par semaine, contre une fois tous les quinze jours au printemps. D’une manière générale, j’ai constaté que cela suffisait pour maintenir toute la forêt-jardin dans une forme correcte, malgré un été très chaud et très sec. Le projet est de faire évoluer le design de la forêt comestible et de s’appuyer sur l’émergence des synergies dans les années qui viennent pour réduire progressivement le besoin en arrosages. Les pulmonaires n’ont quasiment pas été arrosées cet été, grâce aux onagres, par exemple (cf. article précédent). En attendant, nous avons constaté que la ferme de TERA, avec l’accroissement des cultures (forêt-jardin et maraîchage), commence à être en stress hydrique pendant l’été. Notre puits est trop petit et notre source en flux quasi tendu. Il va falloir faire évoluer nos infrastructures au plus vite (voir plus bas).

La guilde du pêcher (presque) complète, cet été. © Gregor Alécian

La tonte des allées aura nécessité deux passages, un fin mai, un début août. Les guildes situées en haut de la pente de notre parcelle consacrée à la forêt jardin n’ont nécessité qu’un seul débroussaillage cette année, en été. En effet, la terre y est plus tassée et plus sèche, la prairie y est clairsemée et basse. Ce qui est un défi pour les cultures est un avantage relatif en termes de demande d’entretien pour le moment. Toutes les plantations ont été désherbées à la main, au moins une fois par mois depuis avril. Le compost de la ferme a donné ses premières cargaisons, nous en avons répandu au pied des plantations. La portion de haie champêtre que nous avions commencé à installer en bordure de parcelle, a elle aussi demandé du débroussaillage, mais peu d’arrosage (elle est en aval de la pente, en fond de vallon, sur une terre végétale beaucoup plus riche et humide). Elle a globalement bien survécu à son premier été.

Le design en permaculture s’enrichit, petit à petit.

Je parlais plus haut de nos besoins en eau. Je privilégie deux pistes d’aménagements : la récupération des eaux de toiture de nos bâtiments, que j’espère voir se mettre en place l’an prochain ; et une évolution du design pour retenir l’eau sur la pente assez marquée de la parcelle de la forêt-jardin (entre 10 et 30 % en fonction des zones). Nous avons tracé les courbes de niveau sur la bordure Est du jardin-forêt, en amont de la pente, grâce à un niveau égyptien. C’est un outil facile à construire soi-même, et relativement précis sur de petites distances. Ici, nous avons tracé cinq lignes de niveau, qui correspondent à cinq baissières qui se chevaucheront sur les 55 mètres de large de la parcelle (le relief ne permet pas de baissière unique sur cette bordure du terrain). Elles ralentiront les eaux de pluie dans leur ruissellement et permettront une infiltration plus lente en profondeur. Sans trop y croire, j’ai proposé de creuser la première à la main (oui, à la pioche, sans pétrole !), pour tester. À ma grande surprise, à plusieurs, et sur des distances raisonnables, c’est un chantier tout à fait réalisable. Le premier tronçon, de 9 m de long sur 80/90cm de large et environ 50 cm de profondeur a été réalisé en deux jours, à trois/quatre personnes. Nous avons semé du seigle et de la vesce sur le talus, dans l’objectif de le stabiliser un peu en attendant de planter d’autres choses dessus. Comme la terre de profondeur est beaucoup plus sableuse que les trente premiers centimètres du sol (très argileux), nous pourrons adapter nos cultures à la texture du talus (agrumes rustiques et/ou légumes racines, par exemple), qui est par ailleurs bien exposé.
Suivi de la création d’un jardin-forêt comestible en permaculture au sein de la communauté du projet TERA.

La première des baissières. On peut voir la vesce et le seigle commencer à lever sur le talus. © Gregor Alécian

D’autres perspectives de design vont être étudiées cet automne. J’envisage pour la suite une unique baissière en travers de la parcelle, trente mètres sous les premières, plus large et moins profonde (la pente s’infléchit en aval des plantations actuelles). Une treille pourrait soutenir des pieds de vigne (le long de la haie de cassissiers) ainsi que le houblon qui pour l’instant se contente de ramper dans un coin. L’agrandissement de la haie champêtre serait bienvenu pour à terme protéger la parcelle des vents glaçants du nord auxquels elle est pour le moment exposée. Et bien sûr, si nous en avons les moyens, mettre en place de nouvelles guildes pour l’an prochain. On ne risque pas de s’ennuyer dans les temps qui viennent. Je vous dis à très bientôt pour un prochain article et bien sûr d’ici là, restez permacools ! Gregor Alécian

Grégor Alécian

Grégor Alécian, citoyen en transition, permaculteur, initiateur du projet de forêt-jardin et membre de la commission communication chez TERA.

TERA est un projet expérimental qui vise à construire un écovillage pour relocaliser à 85 % la production vitale à ses habitants. TERA valorisera cette production en monnaie citoyenne locale, émise via un revenu d’autonomie pour chacun de ses habitants.

Retrouvez le projet TERA sur leur site : http://www.tera.coop

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A propos de l'auteur

Grégor Alécian

Citoyen en transition, permaculteur, initiateur du projet de forêt-jardin et membre de la commission communication chez TERA. TERA est un projet expérimental qui vise à construire un éco-village pour relocaliser à 85% la production vitale à ses habitants. TERA valorisera cette production en monnaie citoyenne locale, émise via un revenu d'autonomie pour chacun de ses habitants. Retrouvez plus d'informations sur le site de TERA : www.tera.coop

4 Commentaires

  1. Perrin

    Pour la ise en place ‘un verger en « aridiculture », de bonnes pistes sur le site d’Eric Escoffier…

    Réponse
  2. vialettes

    je pense a une buttes de la grandeur d’une roue arrière de tracteur circulaire ou carre avec des planches !

    Réponse
  3. vialettes

    bonjour je souhaiterais savoir pourquoi vous faitent pas des buttes autour de vos arbres comme dans le jardin du graal avec des aiguilles de pin pour garder humidité tout l’été ?

    Réponse
    • Grégor Alécian

      Bonjour,

      et bien tout simplement parce que nous nous avons choisi de partir sur le modèle proposé par Permaculture Design, qui n’inclus pas de buttes à l’origine. Mais tout est possible ! Nous nous adaptons au fil des essais/erreurs et nous intégrons de nouvelles techniques/plantes/approches au fil du temps. 🙂

      Réponse

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